Sofia Benlemmane : de la pelouse du Stade de France à la garde à vue pour incitation à la haine
L’influenceuse franco-algérienne est en garde à vue depuis jeudi 9 janvier à Lyon. Dès 2001, son parcours est jalonné d’incidents qui traduisent un mélange de provocations, de violence verbale et de discours haineux.
Un début explosif au Stade de France
L’histoire de Sofia Benlemmane ne commence pas sur TikTok, mais sur la pelouse du Stade de France, en 2001, lors d’un match amical entre la France et l’Algérie. Alors que l’équipe algérienne est menée 4-1 à la mi-temps, une partie des supporters envahit la pelouse, entraînant l’interruption du match – un événement inédit dans l’histoire des Bleus. Identifiée parmi les principales protagonistes de cet acte, l’influenceuse controversée est déjà perçue comme une figure de défiance envers la France. Cet événement marquera le début d’un parcours où les provocations deviendront une constante.
Après deux décennies loin des projecteurs, Sofia Benlemmane refait surface dans un contexte sportif. En 2022, après l’élimination de l’Algérie par le Cameroun lors des qualifications pour la Coupe du Monde, elle décide de se rendre en Gambie pour confronter l’arbitre du match, Bakary Gassama. Accusant ce dernier de favoritisme, elle cherche à l’intimider, mais son initiative tourne court. Arrêtée par les autorités gambiennes, elle est rapidement expulsée. Cet épisode marque un tournant : Sofia n’hésite plus à franchir des frontières pour exprimer sa colère et provoquer des figures qu’elle estime responsables des échecs de l’Algérie.
Quelques mois plus tard, lors de la Coupe du Monde au Qatar, la sulfureuse franco-algérienne fait de nouveau parler d’elle. Cette fois, elle cible les supporters camerounais, qu’elle insulte ouvertement. Lorsqu’un but est inscrit, elle s’exclame : « Voilà, les chiens ont marqué. ». Elle va même jusqu’à provoquer Samuel Eto’o en duel, président de la Fédération camerounaise de football, dans une altercation filmée qui devient virale sur les réseaux sociaux. Ces provocations illustrent son utilisation des grands événements sportifs comme tribune pour ses rancunes personnelles et ses discours polarisants. Par ailleurs, beaucoup s’interrogent sur les moyens qui lui ont permis de financer son voyage et d’y rester plusieurs semaines. Tous les indices convergent vers une hypothèse troublante : son séjour aurait été orchestré et financé par les services algériens eux-mêmes.
En 2024, lors de la Coupe d’Afrique des Nations en Côte d’Ivoire, S. Benlemmane publie une vidéo où elle tient des propos racistes envers les Ivoiriens. Elle y décrit leurs conditions de vie comme « pires qu’à l’âge de pierre ». Cette déclaration de la TikTokeuse : « Normalement l’Algérie ne devrait même pas être en Afrique, elle devrait se retrouver entre le Portugal et l’Espagne. Parce que les Ivoiriens vivent une de ces misères. », illustre une arrogance et un mépris total envers les pays africains, en particulier la Côte d’Ivoire. Ces propos ne sont pas seulement insultants, ils traduisent une vision profondément condescendante et réductrice, qui alimente des stéréotypes nuisibles et des tensions inutiles entre les communautés. Cette prise de position suscite une indignation massive sur les réseaux sociaux et les autorités ivoiriennes ne tardent pas à réagir. Arrêtée puis expulsée, Sofia quitte le pays sous la pression des réactions publiques.
2025 : insultes en direct et menaces de mort
Le dernier épisode en date est celui qui conduit Sofia Benlemmane en garde à vue. En septembre 2024, dans une vidéo en direct sur TikTok, filmée dans le quartier de la Part-Dieu à Lyon, elle insulte violemment une autre femme en arabe, déclarant notamment : « Nique ta mère toi et ta France » et « elle mérite la mort cette pute qui salit l’islam ». Ces propos, signalés à la justice, s’ajoutent à une longue liste de discours haineux diffusés sur ses réseaux sociaux.
En parallèle, la polémiste publie sur Facebook une capture d’écran d’une plainte déposée contre elle par Chawki Benzehra, activiste algérien réfugié en France. Dans ce post, elle divulgue l’adresse personnelle de ce dernier, un acte de doxxing qui met directement en danger la sécurité de sa cible. Il déclare en effet sur X : « Bonne nouvelle avec la mise en garde à vue de la sulfureuse #SofiaBenlemmane suite à la vidéo que j’ai publiée le 04/01… malheureusement elle aura eu le temps de poster hier sur Facebook une capture d’une plainte déposée contre moi dans laquelle elle donne mon adresse. J’espère que la réponse pénale sera ferme vu la gravité de ses propos et de ses actes. ». Ces comportements illustrent une escalade dans ses méthodes, mêlant violence verbale et intimidation directe.
De plus, dans une vidéo qu’elle a elle-même enregistrée et diffusée, partagée ensuite par Mahdi Baladi sur X, Sofia Benlemmane se filme en train de rendre hommage aux services de renseignement algériens depuis un bureau de la police française, vraisemblablement là où elle a été placée en garde à vue. Cette mise en scène provocatrice a suscité une vive indignation et ravivé les interrogations sur ses intentions et ses alliances.
Une influence dangereuse amplifiée par TikTok
Depuis plusieurs années, Sofia Benlemmane a fait des réseaux sociaux, et notamment TikTok, son terrain de jeu. Suivie par une large audience, elle s’est spécialisée dans les vidéos polarisantes et provocantes. Ses propos haineux, souvent anti-français, racistes ou antisémites, trouvent un écho auprès d’un public jeune et influençable. Les algorithmes de TikTok, qui favorisent les contenus engageants, ont largement contribué à amplifier son influence. Malgré des politiques de modération affichées, ses vidéos ont longtemps échappé à toute sanction, permettant à son discours de prospérer dans un climat d’impunité.
Une réponse judiciaire attendue
L’arrestation de la franco-algérienne est une réponse tardive, mais nécessaire face à ses dérives. Thierry Dran, procureur de la République de Lyon, a confirmé l’ouverture d’une enquête notamment pour « menaces de mort » et « provocation publique à la haine ». Ces investigations pourraient aboutir à des sanctions exemplaires, nécessaires pour dissuader d’autres figures publiques de suivre un chemin similaire.
L’heure de la fermeté
L’histoire de Sofia Benlemmane, de l’envahissement du Stade de France à la garde à vue pour incitation à la haine, est un cas d’école des dangers liés à une influence mal encadrée. Sa rhétorique de haine, ses provocations répétées et ses intimidations ciblées nécessitent une réponse ferme, tant de la justice que des plateformes numériques. La liberté d’expression ne doit jamais être un alibi pour diffuser des discours de division et de violence. Son arrestation doit marquer un tournant dans la lutte contre la haine en ligne et rappeler que personne n’est au-dessus des lois, pas même ceux qui s’abritent derrière une audience numérique.
Dorine Vaudron
Laisser un commentaire